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Quelle conception as-tu de la mise en scène ?
J'espère avoir une conception de la mise en scène qui soit libre et ouverte. Je crains d'avoir parfois dû « contourner », donc ma mise en scène n'est plus libre et ouverte à ces moments-là, comme je l'aurais voulu. Par contre il y a dans ce film des choses qui certainement définissent la manière dont je filmerai dans le futur si jamais je peux tourner dans des conditions normales.
Que penses-tu des théories sur la mise en scène de certains des tenants d'un « nouveau cinéma » ?
Il y a un pseudo « nouveau cinéma » et un vrai « nouveau cinéma ». Je ne pense pas grand chose du pseudo « nouveau cinéma ». Mais le nouveau cinéma, celui de films comme Leo the Last ou Portrait d'une enfant déchue pour prendre l'exemple de deux films tout à fait marquants, me paraît à la fois complètement nouveau et complètement en prolongement avec le cinéma de Lang, de Walsh, c'est un même sillon qui se poursuit. Lang et Walsh, pour ne prendre que ces deux exemples, ne faisaient peut-être upas un cinéma intellectualisant, mais un cinéma extrêmement intelligent. Ce n'était pas un cinéma qui se faisait par hasard, même s'il était extrêmement spontané dans certains cas. La rupture se fait quand on ne veut pas prendre le cinéma pour ce qu'il est. Il y a une sorte de conspiration qui vient des gens qui, sachant très bien qu'ils ne savent pas mettre en scène, cherchent à créer une confusion des valeurs en portant la médiocrité en avant. Il n'y a pas une manière unique de mettre en scène, et je défends des cinéastes très différents. La mise en scène, comme l'écriture, dépend d'un certain nombre de règles. Je suis surpris que certains cinéastes soient considérés alors qu'ils mettent très mal en scène. Au niveau de la littérature, on n'arriverait pas à considérer des gens qui écrivent très très mal comme des grands écrivains.
On pourrait te répondre qu'il faut renoncer aux conventions et aux artifices de la mise en scène.
Je ne crois pas que la mise en scène soit faite de conventions et d'artifices. J'ai parlé au contraire d'une mise en scène libre et ouverte. C'est toujours cette conception de la mise en scène que j'ai défendue, et j'espère que c'est elle qui domine dans mon film.
Entretien avec Pierre Rissient, Cinéma 77 nº224-225, aout-septembre 1977
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